Une clause d’exclusivité présente dans un contrat de travail contraint le salarié à consacrer l’intégralité de son activité professionnelle à son employeur, si elle remplit 3 conditions cumulatives (Cass. soc. 11 juillet 2000, n° 98-40.143) :
- être indispensable à la protection des intérêts légitime de l’entreprise ;
- être justifiée par la nature de la tâche à accomplir par le salarié ;
- être proportionnée au but recherché.
S’impose-t-elle toujours au salarié quand sa rédaction est générale et imprécise ?
Un arrêt récent de la chambre sociale de la Cour de cassation apporte des précisions sur ce point.
Un salarié a été engagé en 1997 en qualité de rédacteur concepteur par une société exerçant une activité d’édition et de vente d’ouvrages professionnels.
La clause de son contrat à temps complet, lui imposait de demander une autorisation avant d’exercer une autre activité professionnelle. A compter de 2006, celui-ci bénéficie du télétravail et occupe des fonctions de responsable événements/supports com, chef de marché marketing au sein de la direction Marketing du groupe. En 2013, son licenciement lui est notifié par son employeur.
Ce dernier lui reprochait de n’avoir pas sollicité d’autorisation avant de créer sa société de vente en ligne de vêtements, qu’il avait fait immatriculer en 2010 et d’avoir effectivement exercé cette activité.
Une clause jugée illicite
La Cour d’appel d’Orléans juge que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société à payer au salarié une somme à titre de licenciement abusif, et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de son arrêt dans la limite de trois mois d’indemnités.
L’employeur se pourvoi alors en cassation. D’après lui, la clause du contrat d’un salarié, engagé à temps complet, lui imposant de demander une autorisation avant d’exercer une autre activité professionnelle, ne porte pas atteinte aux libertés garanties par l’article L. 1121-1 du code du travail alors que la Cour d’appel l’avait jugé illicite.
Il estimait également que la clause respectait les 3 conditions cumulatives. En l’espèce, l’employeur faisait valoir que la clause était justifiée par la nécessité de s’assurer de l’absence d’activité concurrentielle, et qu’il ne s’agissait nullement d’interdire l’exercice d’une autre activité professionnelle, laquelle était effectivement exercée par d’autres salariés également liés par une telle clause.
La Cour d’appel avait toutefois retenu qu’en raison de sa formulation, cette clause d’exclusivité aurait permis à l’employeur de porter atteinte à la liberté du travail et même à la vie privée du salarié.
Une clause rédigée en termes généraux et imprécis
La Haute Juridiction confirme la décision de la Cour d’appel et rejette le pourvoi. Celle-ci ayant constaté que la clause d’exclusivité était rédigée en termes généraux et imprécis ne spécifiant pas les contours de l’activité complémentaire qui serait envisagée par le salarié, activité bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisirs et qu’ils ne permettaient pas dès lors de limiter son champ d’application ni de vérifier si la restriction à la liberté du travail était justifiée et proportionnée.
Cet arrêt invite désormais tout employeur à accorder de l’importance à une rédaction suffisamment précise pour toute clause d’exclusivité.
Cass. soc. 16-5-2018 n° 16-25.272 F-D
PB Avocats