Les SARL sont tenues de déposer au greffe du tribunal, pour être annexés au RCS, dans le mois suivant l’approbation des comptes annuels par l’assemblée ordinaire des associés ou dans les deux mois suivant cette approbation lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique. (Art. L. 232-21 du code de commerce). L’inobservation de ces dispositions est pénalement sanctionnée par l’article R. 247-3 du même code.
Est-ce que le dépôt tardif des comptes sociaux peut constituer une faute séparable des fonctions de gérant ? Un arrêt récent de la chambre commerciale de la Cour de cassation est venu apporter des précisions sur cette question.
Les faits soumis à la Cour
Un couple a confié à une SARL divers travaux d’aménagement de leur domicile.
Invoquant l’inachèvement des travaux ainsi que des désordres affectant les prestations réalisées, ils ont assignés celle-ci ainsi que son gérant afin d’obtenir leur condamnation solidaire à leur payer des dommages-intérêts. La société a quant à elle été mise sous sauvegarde.
Les époux reprochaient au gérant la tardiveté avec laquelle il avait déposé au greffe du tribunal de commerce les comptes de sa société. Il avait en effet attendu le 8 novembre 2013 pour déposer les comptes annuels de sa société, relatifs aux années 2011 et 2012.
Cette tardiveté n’ayant pas permis d’après les deux époux d’être utilement éclairés sur l’état de la trésorerie de la société avec laquelle ils s’apprêtaient à contracter.
Décision de la Cour
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait alors condamné le gérant à payer aux époux la somme de 45 899,14 € outre les intérêts au taux légal.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle censure la décision de la Cour d’appel.
D’après les hauts magistrats :
- Seule une faute d’une particulière gravité, commise intentionnellement et incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales du gérant peut engager sa responsabilité solidairement avec celle de la société à l’égard des tiers ;
- La mise en cause de la responsabilité du gérant d’une société à l’égard d’un tiers sur le fondement de l’article L. 223-22 du code de commerce suppose que soit démontré le lien de causalité entre sa faute et le préjudice de ce dernier.
En clair, pour la haute juridiction, il n’a pas été établi de lien de causalité entre les fautes du gérant et les désordres auxquels la réparation correspondait. On peut donc conclure que le dépôt tardif de comptes sociaux n’est pas une faute séparable de la fonction de gérant.
Cass. com. 3 mai 2018, n° 16-23627
PB Avocats