Traditionnellement, la Cour de cassation retient qu’un employeur qui manque à ses obligations ne cause pas automatiquement un préjudice à ses salariés, ce dont il en résulte que ces salariés ne peuvent pas systématiquement demander des dommages-intérêts pour tous les manquements commis par l’employeur.
Cela n’est toutefois pas vrai pour tous les sujets, notamment en ce qui concerne la durée du travail.
La Cour de cassation a atténué sa jurisprudence du « pas de préjudice automatique » en matière de durées maximales de travail, sous l’influence de plus en plus prégnante de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE).
Les faits
Un salarié se voit rompre sa période d’essai au motif d’une insuffisance de résultats. L’employeur saisit le Conseil des prud’hommes pour demander au Conseil de condamner le salarié à lui rembourser des salaires payés en trop. Le salarié, en réplique, demande la condamnation de l’employeur à des dommages-intérêts pour violation de la durée maximale de travail.
Le salarié est débouté de sa demande par la cour d’appel d’Orléans, qui juge que le salarié ne rapporte pas la preuve du préjudice qu’il a subi du fait des manquements de l’employeur à ses obligations en matière de durées maximales de travail.
Il se pourvoit en cassation.
La décision de la Cour de cassation : le dépassement de la durée maximale de travail crée automatiquement un préjudice au salarié
Infléchissant sa propre jurisprudence, la Cour de cassation énonce que la durée hebdomadaire maximale en France est de 48 heures, et que le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire fixé à l’article 6, sous b, de la directive 2003/88 constitue en tant que tel, une violation de cette disposition, sans qu’il soit besoin de démontrer en outre l’existence d’un préjudice spécifique.
Elle ajoute que « le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation ».
Dès lors, la cour d’appel d’Orléans, qui avait pourtant constaté que le salarié avait travaillé 50,45 heures durant la semaine du 6 au 11 juillet 2015, a violé les disposition s applicables en déboutant le salarié de sa demande de dommages-intérêts.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Bourges où le salarié a des chances importantes d’obtenir la condamnation de son employeur à des dommages-intérêts pour dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail.
Reste à savoir combien la cour d’appel de Bourges lui allouera.
10.000,- euros de dommages-intérêts ? Ou plutôt 500,- euros, peut-être ? On a déjà vu moins…
Cass. Soc., 26 janvier 2022, 20-21.636
PB Avocats