La reprise des actes accomplis par une société en formation ne se présume pas

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La reprise des actes accomplis par une société en formation ne se présume pas

Les sociétés commerciales ne jouissent de la personnalité morale qu’à compter de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés (c. com. art. L. 210-6, al. 1). Une société en formation ne peut donc pas conclure des actes, de quelque nature que ce soit, avant son immatriculation.

En pratique, il est indispensable pour une société en cours de constitution de souscrire des engagements, notamment de conclure un bail commercial, afin qu’elle puisse démarrer son activité dès son immatriculation.

Il appartient donc aux associés de conclure avec les tiers et d’agir au nom et pour le compte de la société en formation. Les associés sont alors tenus solidairement et indéfiniment responsables des actes accomplis.

Une fois immatriculée, la société peut, sous certaines formes, reprendre les engagements souscrits par les associés (c. com. art. L. 210-6, al. 2) et ainsi les libérer de toute responsabilité (Cass. com. 13 décembre 2005, n°04-12528).

Dans une récente affaire, la Cour de cassation a refusé l’acceptation implicite d’une société de reprendre les engagements pris par son associée.

La reprise des engagements ne peut pas être implicite …

Une associée fondatrice d’une SARL agissant pour le compte de ladite société en formation avait conclu un bail commercial. À la suite de nombreux différents, le bailleur a demandé en justice la résolution du bail. La SARL a alors prétendu qu’elle n’avait jamais souscrit le bail puisqu’elle n’avait jamais repris l’engagement de l’associée.

Cependant, les juges du fond ont considéré que la SARL avait effectivement repris le bail commercial puisque la société avait agi à plusieurs reprises en qualité de preneur :

  • l’associée s’était présentée lors de la conclusion du bail comme la gérante de la SARL en cours de formation ;
  • la SARL avait conclu un accord transactionnel avec le bailleur en qualité de preneur du bail;
  • la SARL avait intenté des actions en justice en se revendiquant titulaire du bail.
… mais doit répondre à un formalisme réglementaire : pas d’interprétation possible

Cette décision est censurée par la Cour de cassation : la reprise par la société des engagements souscrits par les associés avant son immatriculation ne peut être implicite mais résulte de formalités strictes. Le fait que la société se revendique comme titulaire de l’acte et exécute volontairement les obligations en découlant ne suffit pas.

La Cour de cassation rappelle qu’il existe uniquement trois procédés qui permettent à la société de reprendre les engagements souscrits par les associés fondateurs.

Deux possibilités peuvent être envisagées avant l’immatriculation de la société (article. R. 210-5 du Code de commerce) :

  • soit la signature des statuts par les associés auxquels est annexé un état des actes accomplis pour le compte de la société ;
  • soit la conclusion d’un mandat donné par les associés à l’un ou plusieurs d’entre eux, ou au gérant non associé, et déterminant, dans leur nature ainsi que dans leurs modalités, les engagements à prendre.

À défaut, une autre option peut être accomplie après l’immatriculation. En effet, les associés peuvent toujours prévoir la reprise d’un acte par une décision collective ultérieure prise, sauf clause contraire des statuts, à la majorité.

Il faut impérativement respecter l’une ou l’autre de ces formalités citées par la Cour de cassation pour que la reprise de l’engagement soit effective.

Ainsi peu importe que :

Ces éléments ne valent pas reprise des engagements au nom d’une société en formation.

En conséquence, le bailleur ne pourra plus agir à l’encontre de la société qui est considérée comme tiers au bail commercial. Il n’aura d’autre choix que de se retourner contre l’associée, qui est la seule à avoir la qualité de preneur au bail et donc la seule soumise aux obligations qui en découlent. Ainsi, l’associé pourra être condamnée à régler des loyers impayés, sous réserve qu’elle soit solvable.

Cass. com. 20 février 2019, n°17-14242

Marie LE GARGASSON
Elève Avocat

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