Dans les entreprises d’au moins 50 salariés (« au moins 20 salariés » avant la réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2020), l’employeur doit fixer la nature et l’échelle des sanctions disciplinaires qu’il peut prendre dans le règlement intérieur (C. trav., art. L. 1321-1). L’absence de règlement intérieur l’empêche de faire usage de son pouvoir disciplinaire et de prononcer une sanction autre que le licenciement disciplinaire (Cass. soc., 11 déc. 2015, n° 14-19.954 ; Cass. soc., 23 mars 2017, n° 15-23.090).
Le règlement intérieur doit par ailleurs :
- être soumis à l’avis préalable du Comité social et économique (C. trav., art. L. 1321-4) ;
- être déposé au greffe du Conseil de prud’hommes (C. trav., art. R. 1321-2) ;
- être transmis à l’Inspecteur du travail (C. trav., art. R. 1321-4) ;
- et faire l’objet d’une publicité auprès de toutes les personnes ayant accès aux lieux de travail ou aux locaux dans lesquels se fait l’embauche (C. trav., art. R. 1321-1). Cette publicité s’effectue, depuis le 23 octobre 2016, par tout moyen : affichage au sein des locaux, publication sur l’intranet de l’entreprise, envoi par mail, etc. (D. n° 2016-1417, 20 oct. 2016, JO 22 oct.).
Si l’employeur ne respecte pas l’une de ces formalités, le règlement intérieur est inopposable aux salariés. La sanction disciplinaire prononcée, autre que le licenciement disciplinaire, peut donc être annulée par le juge. Ce sera le cas par exemple d’une mise à pied disciplinaire, d’une rétrogradation ou d’une mutation disciplinaire.
Tel est le rappel opéré par la chambre sociale de la Cour de cassation dans son arrêt du 1er juillet 2020 (pourvoi n°18-24.556).
La mise à pied disciplinaire prononcée à l’égard d’une salariée, certes prévue par le règlement intérieur…
Dans cette affaire, une salariée, qui s’était vue notifier une mise à pied disciplinaire d’une journée, saisit la juridiction prud’homale pour en demander l’annulation. Selon elle, le règlement intérieur n’avait pas valablement été porté à sa connaissance et lui était inopposable : la sanction disciplinaire devait ainsi être annulée.
La Cour d’appel a rejeté les prétentions de la salariée, estimant que le règlement intérieur, qui était affiché dans la salle de pause des locaux dans lesquels elle travaillait, avait bien été porté à sa connaissance.
La salariée s’est alors pourvue en cassation.
… doit toutefois être annulée, faute pour le règlement intérieur d’avoir été porté de façon effective à la connaissance de la salariée
La Cour de cassation a censuré l’arrêt d’appel, considérant que le simple affichage du règlement intérieur dans la salle de pause, alors que la règlementation applicable au moment de l’affichage demandait expressément l’affichage « dans les locaux ainsi que sur la porte des locaux où se faisait l’embauche », privait ce règlement de son caractère opposable.
Cela privait l’employeur de sa possibilité de se prévaloir des dispositions disciplinaires qu’il contenait et donc de prononcer une sanction disciplinaire autre qu’un licenciement.
En conséquence, la mise à pied disciplinaire doit être annulée. La salariée peut alors se voir octroyer un rappel de salaires ainsi que des dommages-intérêts.
Remarque : les faits se sont déroulés avant l’entrée en vigueur du Décret n°2016-1417 du 20 octobre 2016, qui a modifié les règles relatives à la publicité du règlement intérieur. Avant cette date, la publicité du règlement intérieur était obligatoirement assurée par un affichage, à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux et à la porte des locaux où se fait l’embauche. Raison pour laquelle un affichage dans la seule salle de pause comme en l’espèce a été jugé insuffisant. Il n’est pas impossible que, en l’état du droit actuel, la décision de la Cour de cassation eût été moins sévère.
Cet arrêt fait office de piqûre de rappel pour l’employeur : la publicité d’un règlement intérieur ne doit pas être prise à la légère et l’employeur se doit d’en faire une publicité aussi large et effective que possible. Un simple affichage dans une salle de pause, dans laquelle les salariés ne sont pas supposés travailler, avec des documents épinglés au petit bonheur sur un pan de mur entre un frigo et une fontaine à eau, est loin de suffire ; l’employeur ne saurait considérer qu’un tel affichage suffit à porter de façon effective et exhaustive les dispositions du règlement intérieur à la connaissance des salariés.
Le Cabinet PB AVOCATS se tient à la disposition des employeurs et des services RH pour les assister dans la mise en place ou la mise à jour de leur règlement intérieur.