Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance (Art. L. 1222-4 du Code du travail)
Mais un employeur peut-il utiliser les résultats d’une enquête réalisé avec l’accord des délégués du personnel sans en avoir averti au préalable le salarié concerné par celle-ci ?
Dans un arrêt récent, la chambre sociale de la Cour de cassation est venue apporter une réponse claire à cette question.
Rappel des faits
Une salariée d’une société a été licenciée pour faute grave le 13 octobre 2014, au motif qu’un audit confié avec l’accord des délégués du personnel à une entreprise extérieure spécialisée en risques psycho-sociaux avait révélé, à la suite d’entretiens s’étant déroulés les 25 septembre et 1er octobre 2014, qu’elle avait proféré des insultes à caractère racial et discriminatoire et causé, par son comportement, des perturbations graves de l’organisation et de l’efficacité collective.
Celle-ci a ensuite contesté son licenciement devant la juridiction prud’homale.
La cour d ‘appel lui donne raison et déclare le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle condamne l’employeur aux versements de sommes à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour le préjudice résultant des circonstances vexatoires de la rupture.
Au soutien de son arrêt, la cour d’appel expose que le compte-rendu de l’enquête confiée à un organisme, tiers à l’entreprise, constituait une preuve déloyale et donc illicite. La cour d’appel avait en effet estimé que la mise en œuvre de cette enquête, dans laquelle la salariée n’avait pas été entendue, se heurtait à l’obligation de loyauté car elle constituait un procédé clandestin de surveillance de l’activité de la salariée.
Or d’après l’employeur qui s’est pourvu en cassation, le compte-rendu d’enquête ne constituait pas un mode de preuve illicite. L’enquête a valablement pu être menée sans que la salariée en ait été informée, et sans qu’elle ait été entendue, parce que celle-ci avait été diligentée avec l’accord des délégués du personnel à la suite de plusieurs dénonciations des salariés victimes et/ou témoins des faits reprochés à la salariée.
Une enquête « harcèlement » n’est pas un dispositif de surveillance de l’activité d’un salarié au sens de l’article L. 1222-4 du Code du travail, et le compte-rendu de l’enquête constitue une preuve licite
La Cour de cassation donne raison à l’employeur.
D’après la Cour de cassation, une enquête effectuée au sein d’une entreprise à la suite de la dénonciation de faits de harcèlement moral n’est pas soumise aux dispositions de l’article L. 1222-4 du Code du travail et ne constitue pas une preuve déloyale comme issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié.
Bien au contraire, l’employeur a ici respecté ses obligations en matière de sécurité et de prévention des actes de harcèlement.
Cass. soc., 17 mars 2021, no 18-25597
PB Avocats